Mairie de Pexiora Site officiel de la commune

Les Croix de Pexiora

Sur le territoire de Pexiora, on peut encore rencontrer au cours d’une promenade, en bordure de route ou à un carrefour, quelques croix de fer ou de pierre qui ont une petite histoire, transmise le plus souvent de bouche à oreilles à travers des générations, histoire qui doit peut-être plus à la légende qu’à la vérité.

Parfois bien visibles et bien entretenues, quelquefois cachées dans une touffe d’arbustes ou de broussailles, d’autres fois déplacées ou malmenées lors de travaux agricoles, de voirie ou de remembrement, exceptionnellement mutilées par des vandales ou quelque chasseur en panne de gibier, elles demeurent les témoins d’un art religieux populaire, d’une culture paysanne a sauvegarder. Que l’on soit croyant ou pas, elles méritent quelque respect. Les bâtisseurs de mégalithes, de pyramides, de cathédrales pourraient encore retrouver leurs œuvres qui ont, en grande quantité, traversé les siècles malgré les outrages des intempéries ou les destructions de toutes sortes, pour porter le message de leur époque.

Nées de la volonté des hommes du terroir, de leur foi, ces humbles croix auront-elles la même chance ? Leur pérennité ne tient qu’à notre bon vouloir, à notre époque de valorisation des patrimoines culturels a un degré inconnu jusqu’alors. Bergers ou missionnaires, tailleurs de pierre ou forgerons ont donné naissance à ces monuments ruraux que les prêtres ont eu la charge de sacraliser. Qu’elles soient croix des Rogations, croix des Processions, croix de Mission, croix de la Passion ou simples croix du souvenir, se souvient-on encore de leur signification ?

Placées à l’entrée ou à la sortie du bourg, à des croisements de chemins , elles marquaient pour la plupart d’entre elles les limites d’un territoire : bourg, paroisse, consulat, décimaire, diocèse et autres divisions civiles, religieuses et fiscales du Moyen-Age et de l’Ancien Régime.


croix-du-cremat

1 – LA CROIX DU CREMAT

À Pexiora, sortie Est, a l’Autan, sur l’ancienne voie romaine, l’actuelle D33, au carrefour d’un ancien chemin passant par la Coutaude et reliant les diocèses de Mirepoix et de Saint-Papoul, la municipalité vient de remettre en place sur son imposant socle de pierre une belle croix de fer dont l’histoire a dû alimenter bien des conversations centrées sur la croisade anti-cathare.

D’ailleurs, pour de nombreux Pexioranais, elle demeure « La Croix du Crémat », la « Crotz de l’ome crémat ». Et cet « ome » serait un certain Jean Pagès , dit « Serena » qui tenait à Pexiora « une maison » où il aurait reçu des hérétiques. Condamné par l'lnquisition, Jean Pagès aurait été sacrifié sur un bûcher à cet endroit. Thèse a priori fort crédible. À cette époque, Pexiora, fief des seigneurs de Laurac et des Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem, les premiers étant des protecteurs assurés pour les Cathares, les seconds les tolérant fort courtoisement, Pexiora donc était connue comme repère d’hérétiques : « Au pied de la Commanderie, les hérétiques circulaient librement dans la ville. » Mais les historiens sont arrivés et ont donné leur version. Tout d’abord, d’après les Registres de l’inquisition, rigoureusement tenus et fort détaillés, il n’y aurait eu à Pexiora que cinq peines prononcées, cinq peines légères, même pas de prison, peut-être simplement le port de la croix. Qui serait donc cet « ome crémat » ? Peut-être tout bêtement un arbre, un orme , un « olme » en vieux français, forme d’écriture qui se rencontre encore de nos jours, dérivée du nom latin de cet arbre -ulmus-

Henri Ajac, un historien local sérieux, qui a compulsé les terriers et les compoix, les archives notariales et l’important fonds des Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem aux Archives de la Haute-Garonne, nomme cette croix « la croix de Boussenac ».

Une universitaire, dans une thèse prononcée en 1980 devant la Faculté de Toulouse la cite en lui donnant le nom de « Crotz d’Embossenac », la croix du sieur Boussenac. Ce nom, Boussenac n’appartenant à aucune famille demeurant à Pexiora à cette époque, n’ayant laissé aucune descendance connue au cimetière, pourrait être celui d’un grand propriétaire terrien extérieur à notre région. Un chevalier du comte de Foix, Gaston Fébus, possédait bien des terres à Pexiora. On pense que ce serait même son blason qui serait devenu les armoiries de Pexiora. Pour en revenir à notre orme, peut-être que ce Sieur aurait voulu élever une croix du souvenir à l’emplacement de quelque orme abattu, « crémat » par la foudre. À chacun sa vérité : n’oublions pas le cheval de Caligula. Voilà peut- être aussi pourquoi la municipalité, soucieuse de réparer une croyance « hérétique », a fait planter un orme à proximité, entouré de quelques pieds de houx.

Cette propriété du Sieur Boussenac porte, sur la carte de Cassini du XVIIIème siècle et sur les registres cadastraux, le nom de Bernard Dedu, descendant du Raymond Dedu, trouvé par Henri Ajac, propriétaire en 1543 de la métairie « Baraque de Dedu », appelée aussi Pégoteuil. Robert Faure raconte dans son livre comment cette métairie aurait bizarrement disparu pendant la Révolution.

Quelque malédiction aurait donc frappé ces lieux ? Attendons encore quelques siècles avant de nous prononcer définitivement.


croix-du-moine

2 – LA CROIX DU MOINE

Au Sud de Pexiora, sur un ancien chemin de Lasbordes à Laurabuc, aujourd’hui en bordure de l’autoroute, non loin du pont sur la D71, une belle croix de pierre entre deux cyprès : la « Crotz del Monge », la Croix du Moine. À cet emplacement, abandonnés de tous, en pleine nature, lépreux et pestiférés y seraient morts et auraient été ensevelis là par quelque moine ou frère hospitalier.

Dans les textes il est dit que Pexiora avait pris des mesures sévères pour se protéger des malades et des décès suspects, « stropiats, fantômes grimaçants et squelettes ».

Memento quia pulvis es et in pulverem reverteris

Souviens-toi que tu es poussière
et que tu retourneras en poussière


croix-du-pountet

3 – LES CROIX DU POUNTET

À l’Ouest, porte de Cers et sur l’ancienne voie romaine, une croix de pierre, la Croix du Pountet, puis un peu plus loin, une croix de fonte, la Croix de la Rivière, aujourd’hui cachée dans un fouillis d’arbustes sur un talus en bordure de la propriété du même nom.

Pour ces deux croix nous ne pouvons que vous citer encore Henri Ajac : « La Croix de Pech-Donat » (de Lamellarié ou de la Rivière) située sur la Voie Romaine, à l’Ouest de Pexiora, au carrefour du chemin de Saint-Martin-LaLande à Laurac. Cette croix fut certainement une croix limite de la Sauveté puis du Castrum de 1194. Au XVIIIème siècle, une grande croix de pierre taillée située au milieu de la Voie Romaine marquait la limite des diocèses de Mirepoix et Saint-Papoul mais aussi des paroisses de Laurac, Saint-Martin-La Lande et Pexiora.

Elle portait le nom de Lammelarié que certains traduisaient en « Amanderaie » alors qu’il s’agissait de la « Maladrerie » qui se trouvait à cet endroit au Moyen-Age. Actuellement, une quelconque croix de fonte, près de cet emplacement, porte le nom de « Croix de la Rivière », du nom du domaine attenant.


croix-du-coq

4 – LA CROIX DU COQ

À Pexiora, dans la Grand’Rue on peut voir la « Croix du Coq » ou « Croix de la Fontaine du Coq ».

Cette grande croix en fer forgé est une Croix de la Passion ou Croix des Outrages, comme l’on peut en rencontrer dans plusieurs localités lauragaises. Elle ne porte plus ni date ni signature mais on peut l’attribuer au maître forgeron Cazala de Ricaud à qui l’on doit presque toutes celles que l’on trouve dans notre région. Suivant les possibilités financières du commanditaire, la croix est plus ou moins chargée de symboles de la Passion du Christ. A Salles sur l’Hers, à Varilhes, sur la place Saint-Pierre à Toulouse ont été dressées les plus riches et les plus fournies. Celle de Pexiora , dont le socle a été scellé dans une construction maçonnée qui cache très certainement la plaque portant la date et la signature de l’artisan, ne comporte que les symboles suivants :

  • à son sommet, le coq qui évoque le triple reniement de Pierre ;
  • au croisement de l’arbre et des bras de la croix, le soleil qui rappelle qu’il s’est voilé à l’instant même de la mort de Jésus ;
  • l'éponge imbibée de fiel et de vinaigre tendue vers le Christ au bout d’une tige croisée avec
  • la lance utilisée pour traverser le côté de Jésus afin de s’assurer de sa mort ;
  • le titulus classique INRI, abréviation de « Jésus de Nazareth, Roi des Juifs ».

La très riche Croix de Salles sur l’Hers -17 symboles- est datée de 1810, tandis que celle de Castelnaudary, plus pauvre que la nôtre porte la date de 1807.