11 novembre 2018
MON PAPA EN GUERRE
Lettres de poilus, mots d’enfants, lus par les membres du CME lors de la cérémonie de mise en lumière du monument aux morts.
Ne vous inquiétez pas, ma chère maman …
Ne seriez-vous pas fière d’avoir dix fils à la guerre ! Et quand bien même il en resterait quelques-uns ! Quelle consolation pour vous et pour ceux qui resteraient de penser que ceux qui ne sont pas revenus sont morts glorieusement et en faisant leur devoir !
De Joseph de Lonqevialle à sa mère, août 1914
Embrasse bien mes chers Petits que j’aime tant et tant, cause-leur tout de même un peu de moi, il ne faut pas qu’ils oublient Papa.
De Marin Guillaumont à sa femme Marguerite, 15 décembre 1914
Mon cher papa,
Je n’ai pas de devoirs ni de leçons aujourd’hui et en profite pour t’envoyer ce petit mot. Mon tonton Alphonse m’a envoyé cette carte pour que je te l’envoie. C’est une grande de la classe à Yvonne qui nous a fait l’école car Mme Labé avait son mari en permission et elle a été se promener. Mon cher papa je vais tâcher de m’appliquer pour devenir la première. Nous sommes toujours en bonne santé. Nous t’embrassons tous bien affectueusement. Ta petite fille qui t’aime. Madeleine
De Madeleine à son père, lundi 3 janvier 1915
Où sont les bonnes randonnées du dimanche en auto ? Où sont-elles ? Quand reviendront-elles ? Étais-je pourtant assez heureux de partir le samedi avec tout mon monde, petits et grands ? Heureux jours de joies familiales ! Sacrifices tous ceux-là, ajoutés à tant d’autres.
D’Alexandre Louis Jacqueau à son épouse, mai 1915
Le courrier du soir a apporté avec la tienne, les lettres de Paulette et des enfants, ainsi que leurs deux images. J’ai sangloté.
Alexandre
À mon petit Armand
Tu es encore bien jeune et ne peux comprendre ce qui se passe en ce moment: la guerre, ses horreurs, ses souffrances. Cette carte sera un souvenir de ton père, et il souhaite qu’à l’avenir les hommes soient meilleurs, et que semblable chose ne retourne arriver. Que jamais tu n’aies besoin, et sois forcé, de mener la vie que je subis en ce moment en compagnie de beaucoup de papas qui ont laissé, comme moi, de petits anges chez eux[…]
Rappelle-toi aussi que le vrai bonheur ne se trouve pas dans la richesse et les honneurs, mais dans le devoir vaillamment accompli, ainsi que les bonnes actions.[…]
J’espère n’avoir pas à rougir de toi car je sens que tu suivras le chemin de l’honneur.
En attendant de pouvoir te choyer et caresser, je te fais, mon petit fanfan, de grosses bises.
Joseph Thomas
De Joseph Thomas à son fils Armand, 5 août 1915
Mon petit papa,
Pendant toute l’année j’ai été bien sage alors je crois que le petit Père Noël viendra remplir mes sabots, et ne pas t’oublier non plus. Sur mon dernier cahier la maîtresse a mis « Geneviève est une bonne petite élève ».
Ta petite Vévette qui t’embrasse
De Geneviève de Gieysz à son père Alexandre, 13 décembre 1916
Mon cher papa,
C’est avec plaisir de voir la nouvelle année arriver pour venir te souhaiter mes meilleurs vœux de bonne et heureuse année ainsi qu’une parfaite santé et une bonne chance afin de revenir cette année avec nous pour toujours et voir la fin de cette guerre cette année. Maintenant je vais te dire que j’ai labouré un jour dans les terres noires mais maintenant le Brabant est dans l’eau on ne voit plus qu’une épaule et je vois que je ne suis pas prête de labourer maintenant. Mes poulains ne sont pas foulés pour le moment mais de ce temps-là on va au bois dans la forêt et on a été en chercher une charretée avec Robin. Enfin mon cher papa je ne t’en mets pas plus long car la carte n’est pas grande.
De Georgette à son père, 28 décembre 1916
28 septembre 1917
Mon chéri, je pars aux tranchées ce soir. Embrasse bien la maman pour moi. Ton papa qui t'aime et pense à toi,
Louis Guéno
Lettre de Louis Guéno à son fils Pierre qui a trois ans et ne sait toujours pas lire… !
Mon petit papa,
Je te souhaite une bonne année, c’est pour que tu reviennes bien vite. Je suis bien contente de t’écrire ces deux mots, car cette année sera l’année du bonheur. J’espère que 1918 amènera ton retour.
Geneviève et Madeleine
De Madeleine et Geneviève de Gieysz à leur père Alexandre, 12 décembre 1917
Mon père nous causa un dernier moment avant son départ, nous recommandant beaucoup de choses sages et nous disant de veiller à ce que maman se ménage. Il nous parla aussi de ce qu’il nous faudrait faire pour nos propriétés, et pour d’autres choses. Il appela Vonet et lui dit d’être bien gentil avec maman. Puis nous attirant vers lui, nous embrassa très tendrement. Nous nous dîmes au revoir. Lui et nous, étions émus. Qui sait ?…
Journal de Robert Congar, 6 janvier 1918
Mon cher petit papa mignon,
Nous nous inquiétons beaucoup car depuis le 27 avril nous avons pas de nouvelles de toi, mon petit papa mignon. Ce matin j’ai fait deux dessins que je t’envoie. C’est un général et une vache en train de manger. Aujourd’hui la bonne s’en est allée ce matin car sa mère s’en va dans le Midi et elle s’en va avec elle.[…] Il y a la mère Brinon en train de laver la vaisselle. Je t’envoie une fleur. Reçois de ton cher petit gars les meilleurs baisers du plus profond de son petit cœur.
Albert
D’Albert Després à son. père Albert-Jean, 10 mai 1918